Journée mondiale de la sécurité des patients

Journée mondiale de la sécurité des patients le 17 septembre

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L'édition de cette année est l'occasion de se pencher sur l'aggravation des tensions d'approvisionnement en antibiotiques et vaccins.

En 2022, il y a eu 1 602 déclarations de rupture de stock pour des médicaments : ces derniers n'ont pu être dispensés ni en ville ni à l'hôpital pendant au moins 72 heures, soit parce qu'ils n'étaient réellement plus disponibles chez l'exploitant, soit à cause d'une mauvaise répartition géographique des stocks. On pense notamment à l'amoxicilline et à l'amoxicilline/acide clavulanique pédiatriques qui ont fait défaut plusieurs mois cet hiver, en raison d'une rupture mondiale d'approvisionnement. La levée des gestes barrières liés au Covid-19, qui a remis d'un coup tous les virus et bactéries en circulation, n'explique pas tout. Rappelons en effet qu'il y avait déjà 1 222 déclarations de rupture de stocks pour des médicaments en 2019. La crise sanitaire n'a fait que révéler les limites des politiques de délocalisation massive et de production à flux tendu dans l'industrie pharmaceutique.

« Quand une rupture s'annonce sur un antibiotique, nous travaillons avec les pédiatres et l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), parfois dans des délais très courts, pour proposer des alternatives aussi efficaces et aux profils de tolérance équivalents, indique le Dr. Rémy Gauzit, infectiologue responsable du groupe Recommandations de la SPILF. Jusqu'ici, nous avons toujours réussi à en trouver, mais avec un risque « d'effet domino » de plus en plus grand : les prescriptions se reportent sur d'autres molécules, qui voient leurs stocks s'amenuiser à leur tour. » Quand la situation persiste, les médecins peuvent être amenés à limiter leurs prescriptions. Ainsi, cet hiver, dans certains territoires, des enfants ont dû attendre 48 h d'être sûrs que leur otite ne guérisse pas spontanément pour recevoir de l'amoxicilline.
Les vaccins ne sont pas épargnés. Les ruptures obligeant à reporter des injections obligatoires chez le nourrisson (Infanrix, BCG…) ne sont pas rares.

D'un côté, la demande mondiale augmente. De l'autre, les industriels abandonnent les produits les plus anciens, devenus moins rentables, ou les vendent aux plus offrants. L'accès aux soins n'est plus une évidence, comme en atteste le rapport déposé en juillet 2023 par la commission d'enquête du Sénat sur les pénuries de médicaments. Des mesures ont bien été prises en France pour renforcer la responsabilité des exploitants : établissement de plans de gestion des pénuries pour les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM), alerte des autorités en cas de risque de tension, constitution de stocks de sécurité… Mais « elles sont peu respectées et les contrôles des administrations de tutelles trop parcimonieux », regrette le Dr. Rémy Gauzit. Espérons que les premières sanctions pour non-respect de ces obligations, prises récemment à l'encontre d'industriels, et la volonté de l'Europe de relocaliser la production de certains MITM inverseront la tendance.


Dr. Rémy Gauzit
Médecin réanimateur et infectiologue
Co-responsable du groupe Recommandations de la SPILF